1885, Salpêtrière. L’illustre docteur Charcot organise chaque année un grand bal réunissant ses patientes et le Tout-Paris voyeuriste, exalté par la présence des aliénées. Une femme fait une crise d’hystérie suite à un viol ? Folle, enfermez-là. Une veuve est jugée trop mélancolique depuis la mort de son mari ? Aliénée, direction la Salpêtrière. Eugénie, Louise, Thérèse, Jeanne… des milliers de femmes claquemurées, muselées et soumises aux aux expériences douteuses de Charcot, précurseur en matière d’hypnose. Zoom sur l’influence de la psychiatrie patriarcale qui domine les moeurs du 19e siècle.
Qui, du patient ou du soignant, est le plus déséquilibré ?
Je m’intéresse beaucoup à l’influence de la psychiatrie sur la société – je vous recommande d’ailleurs l’excellent livre La folle histoire des idées folles en psychiatrie de Boris Cyrulnik et Patrick Lemoine (Odile Jacob). Dans Le Bal des folles, Victoria Mas met en lumière la souffrance féminine et soulève des questions fondamentales. Qui, du patient ou du soignant, est le plus déséquilibré ? Pourquoi un hypnotiseur qui transforme un hôpital en zoo serait-il considéré comme plus sain d’esprit qu’une femme extériorisant ses émotions suite à un traumatisme ?
Malgré une petite impression de déjà-vu vis-à-vis du livre La salle de bal d’Anna Hope, le roman a tout pour séduire le lecteur. Une plume limpide, des personnages attachants, un récit poignant, Victoria Mas nous transporte dans les coulisses enténébrées de la Salpêtrière. J’aurais aimé que le sujet soit traité un peu plus en profondeur, notamment sur le fameux Bal quasiment inexistant dans le récit. Le Bal des folles est un roman engagé et émouvant, qui retrace dans une prose limpide le soulèvement des femmes face à l’institution psychiatrique abusive du 19e siècle.
Fun fact : Victoria Mas est la fille de Jeanne Mas, la chanteuse de “et puis johnny, johnny serre le vide dans ses bras”. Et j’avoue, j’adore ce son.
Maison d’édition : Albin Michel
